Le Houx

Logo spirale, Ordre des Bardes, Ovates et Druides.

Tous les ans, à la fin de l’été, le Roi du Houx gagnait la bataille contre le Roi du Chêne pour obtenir la souveraineté de l’année, il était ainsi le souverain suprême pendant toute la saison sombre. À la fin de l’hiver, une autre bataille avait lieu, et c’est le Roi du Chêne qui la gagnait pour gouverner triomphalement pendant les mois d’été. C’est cet ancienne histoire qui est mise en scène dans le roman médiéval « Gauvain et le Chevalier Vert », où le Géant, dont l’insigne est une grosse branche de houx, entre dans la cour d’Arthur le Jour de l’An. Lui et un des chevaliers d’Arthur, Sire Gauvain, dont le nom signifie le Faucon de Mai, participent à un concours de décapitation. Gauvain qui, comme son nom le suggère, symbolise la partie croissante de l’année, coupe la tête du Chevalier Vert, mais celui-ci, de façon magique, est toujours en vie et lui fera la même chose la prochaine fois, ce qui signifie sans aucun doute, la fin de l’été.

branch, Ordre des Bardes, Ovates et Druides.

Un symbole de l’hiver

Pendant les jours sombres et stériles de l’hiver, on a toujours apprécié le houx pour ses feuilles vertes persistantes et ses baies colorées, symbolisant le vert de la croissance et le rouge du sang ; c’est un arbre nous donnant espoir en nous rappelant que le renouveau du printemps est à venir. Les Romains l’utilisaient dans leur célébration hivernale des Saturnales, et il se pourrait bien que cette coutume se soit étendue jusqu’en Angleterre.

Avant que l’arbre de Noël n’arrive en Angleterre au dix-neuvième siècle, une grande boule de feuilles persistantes et de baies de houx était accrochée dans la maison ou dans l’entrée ; elle était décorée avec des rubans, des roses en papier, des pommes et des oranges. Une crèche y était représentée avec trois petites poupées, représentant Joseph, Marie et l’enfant Jésus. On l’appelait boule à baisers car on y avait accroché un rameau de gui en dessous, pour signifier la grande espérance qui se cache en dessous !

Dans le Yorkshire, les filles prenaient une branche de houx décorée de façon similaire, mais sans les personnages ni le gui, pour participer aux cérémonies de wassailing[1] dans les vergers. Cela se faisait aussi dans les zones urbaines. Au XVe siècle à Londres, par exemple, des mats décorés de guirlandes de houx et de lierre étaient disposés le long du lieu des « Christmas Sports »[2].

Il était important d’apporter la bonne sorte de houx au bon moment. Dans le Somerset, on ne devait pas faire entrer du houx à la maison avant le réveillon de Noël et, à ce moment-là, cela ne devait se faire que par un homme. Le houx stérile était dangereux pour l’homme et les bêtes, et si une année le houx n’avait pas de baie, il était sage d’ajouter du lierre ou du buis à une couronne ou une boule pour favoriser la chance, car le manque de baies ne pouvait qu’indiquer l’infertilité ou la mort.

Dans certaines régions d’Angleterre et d’Allemagne, on différencie les houx « mâles » des « femelles » : ceux ayant des feuilles épineuse étant considérés comme mâles et la variété à feuilles à bord lisse étant les femelles. La sorte de houx qui était apporté à la maison déterminait qui de l’homme ou la femme dirigerait la maisonnée dans l’année à venir.

[1]Cérémonies pendant lesquels on faisait offrande d’une boisson sacrée, souvent du cidre ou de l’hydromel.

[2]Idée de Charles Dickens, considéré à son époque comme l’incarnation du Père Noël par les Anglais, et qui a eu l’idée d’organiser des jeux sportifs pendant les douze jours de Noël.

Logo 3cercles, Ordre des Bardes, Ovates et Druides.

Le Houx et le Lierre

Le houx était souvent associé au lierre dont les baies symbolisaient la nuit et l’obscurité. Dans certaines régions, le houx représentait le roi et le lierre la reine, comme il est exprimé dans ce vieux chant de Noël du Somerset :

O the Ivy O, she’s the Queen of old,
And the Holly he is red.
Hang ‘en high in the farm, and us won’t come to no harm Till the Christmas days be told.
Oh le Lierre oh, c’est la reine d’autrefois
Et le Houx, il est rouge.
Accrochez-les bien haut dans la ferme, qu’il ne nous arrive aucun mal jusqu’à ce qu’on raconte les jours de Noël.

 

Le houx et le lierre sont souvent associés dans les poèmes dans une sorte de débat qui détermine qui doit régner, comme dans le poème médiéval qui suit :

Holver and heivy made a great party,
Who should have the maistry (mastery)
In londes (lands) where they go…
Houx et Lierre ont fait une grande fête
Pour savoir qui devait avoir la maîtrise
Des terres où ils vont…

 

Le houx lumineux gagne habituellement, comme il est dit dans ce chant de Noël en Moyen-Anglais :

Nay! Ivy, nay!
lt shall not be, iwis, (indeed):
Let Holy have the maistry, (mastery)
As the maner is.
Holy stond in the hall
Faire to behold: ivy stond without the dore
She is full sore acold.
Non ! Lierre, non !
Ce ne sera pas, vraiment :
Laisse le houx/(saint) gouverner
Comme le veut la coutume.
Houx est dans la halle
Il est beau à voir : Lierre est en dehors
Elle n’apporte que le froid.

 

 

Et les vers continuent pour écarter le pauvre lierre en faveur du houx, comme ce chant de Noël contemporain l’explique :

Of all the trees that are in the wood,
The holly bears the crown
.
De tous les arbres du bois
Le houx porte la couronne.
branch, Ordre des Bardes, Ovates et Druides.

Festivités

Le houx était considéré comme sacré par les Druides ; ils s’utilisaient en particulier le jour de Noël car on croyait que le bétail allait prospérer si les animaux le regardaient ce jour-là.

Après Noël, le houx jouait encore un rôle important. Le jour d’Hogmanay[1], dans les Highlands écossaises les garçons se fouettaient les uns les autres avec ses rameaux épineux – pour avoir de la chance ! Chaque goutte de sang issue de ce rite douloureux signifiait une année de bonne santé et de prospérité. Dans certains lieux, le houx de Noël devait être brûlé la Douzième Nuit ou de la malchance s’ensuivrait. Une autre coutume ancienne voulait qu’il reste en place jusqu’au Mardi Gras, et encore une autre, qu’il devait être gardé jusqu’à l’année d’après pour protéger la maison de la Foudre. En Écosse, la veille de Candlemas (1er Février) était le moment approprié, juste avant que l’ancien festival de Brigid n’accueille le retour de la lumière. Dans le chant de Robert Herrick appelé « Candlemas Eve » (Veille de la cérémonie des bougies), le houx est remplacé par de nouvelles plantes vertes ;

Down with the rosemary and bays,
Down with the mistletoe;
Instead of holly, now upraise
The greener box, for show.
Au diable le romarin et le laurier
Au diable le gui
Au lieu du houx, voici que s’élève
Le buis bien plus vert

 

On brûlait souvent ses feuilles de manière cérémoniale. Dans le Lake District[2], une procession appelée le « Portage du Houx » se déroulait tous les ans. On mettait le feu à l’arbre que l’on portait haut dans toute la ville ; les gens suivaient, portant des torches et des branches enflammées, pendant que d’autres faisaient exploser des fusées et des pétards.

Une autre histoire célèbre de procession de houx avait lieu le lendemain de Noël (jour de la St Étienne) dans certaines régions d’Écosse et d’Irlande. Dans l’ancien rituel appelé la « Chasse au roitelet », un ou plusieurs oiseaux étaient tués et suspendus à une grosse branche de houx sur un mat qui était porté dans toute la ville par un groupe de garçons qui s’arrêtaient à chaque maison pour mendier de l’argent.

Un rituel élaboré où l’on brûlait des plantes qui restaient vertes en hiver se déroulait dans le Kent au dix-huitième siècle : les filles devaient voler un « garçon houx » aux garçons garçons qui, en retour volaient une « fille lierre » dans le groupe des filles. Les deux effigies étaient brûlées dans ce qui pourrait ressembler à un bûcher rituel pour les souverains de l’ancienne année mourante. Une bataille similaire avait lieu au Sud du Pays de Galles le lendemain de Noël, jour qui était appelé le « Holming Day » (le jour du « houchage ») : les garçons attaquaient les filles avec des branches de houx, ce qui symbolise sans aucun doute le triomphe du principe masculin de la lumière sur l’obscurité féminine.

Ses couleurs symbolisant la vie semblent en avoir fait un arbre rituel populaire également à Pâques, au moins dans le Northumberland. Au siècle dernier, les jeunes gens des deux sexes allaient dans les bois le mardi de Pâques, accompagnés par un clerc paroissial qui jouait du violon. Ils décoraient une croix de pierre avec ses branches puis ils dansaient. Ici, il semble avoir symbolisé la résurrection, mais d’autres légendes chrétiennes assimilent l’arbre avec le bois du crucifix, et affirment que c’est depuis ce jour qu’un sortilège le fait pousser sous la forme d’un buisson rabougri et épineux. Comme dans les légendes qui entourent l’aubépine, il a été dit que le houx avait aussi participé à la fabrication de la couronne d’épines du Christ et Son sang en aurait teinté les baies en rouge ; « le houx et le lierre[3] » parle des fleurs blanches du houx, de ses baies rouges et de son écorce rugueuse pour démarquer les étapes de la vie de Jésus. À l’origine, le mot anglais qui désigne le houx, holly, provient du Vieil Anglais hoelrgn et du Vieux Norrois Hulfr qui ont donné naissance au nom médiéval hulver utilisé par Chaucer. Mais l’église « christianisa » l’arbre en déclarant que son nom signifiait « saint » (holy en Anglais).

[1]1er jour de l’année en Écosse.

[2]Une région du Nord-Est de l’Angleterre

[3]Un chant de Noël traditionnel en Angleterre

branch, Ordre des Bardes, Ovates et Druides.

Qualités de protection et de guérison

Tout comme le sorbier, le Houx protégeait contre la sorcellerie. Les prisonniers écossais emmenés dans le Norfolk pour assécher les Fens[1] plantaient des branches de houx autour des huttes où ils dormaient pour se protéger des sorcières, probablement parce qu’ils n’y trouvaient pas leur Sorbier natal. Mais les Anglais suivaient cette coutume aussi. Un solide bâton de houx était une bonne chose à avoir quand on rentrait à la maison en traversant les Fens les nuits sombres, et les bâtisseurs faisaient les seuils des maisons avec ce bois de façon à ce que les sorcières ne puissent pas y entrer. Si vous voyez un ancienne haie de houx autour d’une chaumière, elle peut avoir été délibérément plantée là pour la même raison. On l’utilisait également en magie populaire pour les maladies physiques. Dans le Hampshire, les enfants qui souffraient de coqueluche buvaient dans une tasse faite de bois de houx.

Un ancien remède contre les vers consistait à placer du houx et de la sauge dans un bol d’eau. Quand le patient baillait au-dessus du bol, on s’attendait à ce que les vers tombaient dans l’eau. Il était aussi utilisé comme instrument de flagellation pour guérir les engelures.

Dans le Nord de l’Angleterre, le houx était utilisé pour la divination par les rêves. Dans un rituel, on plaçait les feuilles d’un houx femelle sous l’oreiller pour faire des rêves prémonitoires ; dans un autre, une jeune fille mettait trois seaux d’eau dans sa chambre et épinglait trois feuilles de houx sur son cœur avant d’aller de coucher la nuit des réveillons de Noël, du jour de l’an, du solstice d’été ou d’Halloween. Elle s’attendait à être réveillée par trois cris, comme » si ça venait de la gorge de trois ours », succédant à autant de rires rauques. Quand tout cela s’était tu, la forme de son future mati lui apparaissait et lui montrait son futur amour en changeant la position des trois seaux d’eau. Si elle ne comptait pas pour lui, elle retrouvait les trois seaux à la même place le lendemain matin.

Aujourd’hui, le solstice d’été est passé et le Roi du Houx a gagné sa bataille annuelle contre le Roi du Chêne ; nous accueillons cet arbre avec ses fleurs blanches qui, avant longtemps, deviendront les baies rouges familières qui illuminent la partie la plus sombre de l’année.

[1]Région anciennement marécageuse de l’Est de l’Angleterre.

Traduction Okada