Par Luernos Glanicae
« Tout s’écoule, au dedans et au dehors ; toute chose a sa durée ; tout évolue puis dégénère. ». Cette notion de temps cyclique, de rythme naturel, exprimée ici dans le cinquième des sept principes hermétiques, nos ancêtres l’avaient intuitivement perçue depuis l’aube de l’humanité. L’observation du cycle de l’astre lunaire permit l’élaboration des premiers calendriers.
Proches dans leur durée, le cycle menstruel et celui de la lune étaient considérés comme intimement liés. Dans une union secrète de l’univers avec la nature, la femme et l’astre de la nuit partagèrent leurs forces intrinsèques, opératives et symboliques.
Aux caractères féminins de fécondité, d’intuition, de création, de beauté, furent associés les aspects symboliques lunaires : les mystères de la nuit, la mort, la magie, les rêves.
La lune fut toujours honorée en tant que source de puissance passive, capable d’agir sur les cultures, les saisons, les marées et les humeurs.
Tour à tour noire dans les ténèbres ou phare dans la nuit, elle est l’image même de l’impermanence. Ce changement est perceptible au-travers de ses différentes phases, se déroulant sur quatre semaines.
La lune noire est le pivot, finalisant le précédent cycle et amorçant le cycle suivant de 28 jours.
Les quatorze premiers jours du cycle, les énergies lunaires sont en phase ascendante. La première semaine, la lune est à mi-course de la portion montante. Elle dessine un D dans le ciel ; c’est le premier quartier. L’apogée des énergies sera atteinte en fin de semaine 2 lorsque la lune est pleine. Sur les deux semaines qui suivent, l’intensité des énergies lunaires décroît. La lune sera à moitié pleine à la fin de la troisième semaine, en présentant cette fois la forme de la lettre C (dernier quartier).
Réduisant encore, de gibbeuse décroissante à dernier croissant, elle disparaîtra à nouveau du ciel nocturne en fin de semaine 4.
Dans de nombreuses traditions, il est commun de travailler suivant le cycle de la lune. C’est une façon de se mettre au diapason de ses énergies, et d’œuvrer harmonieusement avec notre terre-mère qui respire au même rythme.
La plupart du temps, c’est le temps fort de la puissance lunaire qui est célébré. Appelées esbats, ces fêtes ont ainsi lieu douze voire treize fois dans l’année, lorsque la lune est pleine.
Je vous propose une symbiose un peu plus profonde encore avec notre luminaire céleste, en se mettant en accord avec son « inspir/expir » et celui de la Nature.
Pour se faire, nous inviterons les Élémentaux à se joindre à nous. les Élémentaux sont les Esprits qui incarnent les Quatre Éléments : Terre/Air/Feu/Eau.
Les Quatre Éléments ont été définis par les philosophes pré-socratiques comme les substances fondamentales de notre Univers. Ils furent intégrés dans la tradition alchimique qui lui ajouta un cinquième élément, l’éther, qui représente la somme et l’aspect spirituel des quatre premiers, la fameuse quintessence (« quinte-essence »).
Le savant et philosophe byzantin Michel Psellos fut un des premiers à aborder les Esprits élémentaires, mais c’est à Paracelse et à l’Abbé de Villard que l’on doit leur description et leur nom : Gnomes pour la Terre, Sylphes pour l’Air, Salamandres pour le Feu et Ondines pour l’Eau.
Au XIXe siècle, Éliphas Lévi et Papus, deux grandes figures de l’occultisme, incorporeront des rituels en lien avec les Élementaux dans leurs traités respectifs de magie.
Même si vous n’adhérez pas à la réalité de ces génies des éléments et décidez de les considérer comme des archétypes symboliques, travailler conjointement avec les élémentaux et la lune permet de bénéficier de la synergies des énergies cosmo-telluriques avec celles de notre satellite.
Ainsi, la lune noire (nouvelle lune), est un temps de mort symbolique, celui où la vie est en dormance dans le terreau fertile, prête à repartir. L’élément Terre lui est associée.
Lors du Premier Quartier, en pleine phase d’ascension des énergies, nous sommes dans une période de croissance dynamique, active (Yang) symbolisée par l’élément Air.
À la Pleine Lune, les énergies ont atteint leur intensité maximale. L’activité est à son paroxysme comme le représente parfaitement l’élément Feu.
Le Dernier Quartier est le point médian de la phase décroissante des énergies. Nous sommes alors dans une période passive, de type Yin, à l’image de l’élément Eau.
Si vous souhaitez vous lancer dans cette belle aventure que représente cette rencontre avec le monde des Élémentaux, il est préférable de bien définir la date la plus propice à ce travail. La célébration de cette cérémonie sera fonction de la phase lunaire, bien sûr, mais aussi du moment idéal pour vous.
Je vous conseille de planifier chacun d’entre eux dans une période n’excédant pas 36 heures (1jour et demi) avant ou après la phase lunaire considérée.
🌑 Nouvelle lune/lune noire (+/- 36 heures) | Rituel des Gnomes, Élémentaux de la Terre |
🌓 Premier Quartier (+/- 36 heures) | Rituel des Sylphes, Élémentaux de l’Air |
🌕 Pleine Lune (+/- 36 heures) | Rituel des Salamandres, Élémentaux du Feu |
🌗 Dernier Quartier (+/- 36 heures) | Rituel des Ondines, Élémentaux de l’Eau |
Ne vous sentez aucunement obligé de réitérer chacune de ces cérémonies à chaque cycle lunaire ; de même que vous pouvez, selon votre affinité avec tel ou tel élément, ne célébrer que l’une d’entre elles. Célébrer le rituel des Salamandres peut être une excellente manière d’appeler à soi la vitalité et le dynamisme de l’élément Feu, tandis que le rituel des Gnomes, associé à l’élément Terre, favorise la stabilité et l’ancrage.
On peut également préférer privilégier des moments particuliers de l’année pour honorer les Élémentaux, lorsque une phase lunaire tombe en même temps qu’un autre événement astronomique : équinoxe ou solstice.
Enfin, ces cérémonies peuvent être l’occasion pour vous d’aller plus loin, à la rencontre des génies des éléments, tout comme certains rites sont une approche des Êtres de la Nature (Petit Peuple) ou des Animaux totem. Abordez alors comme une forme de voyage chamanique à la découverte de « ce qui est invisible pour les yeux et que l’on ne peut voir qu’avec le cœur. »
Une seule règle : que vous soyez toujours en accord, physiquement (Terre), mentalement (Air), émotionnellement (Eau) et spirituellement (Feu) avec le travail que vous souhaitez accomplir et l’expérience que vous avez envie de vivre.
Les rituels que je vous propose s’inscrivent dans la tradition druidique que je suis. Vous pouvez les adapter selon votre sensibilité et vos croyances.
Pour votre espace rituel, choisissez un endroit en extérieur où vous pouvez être au calme, face à un arbre qui sera le centre de votre espace. Traditionnellement les arbres sacrés dans la culture celte sont l’Aulne, le Bouleau, le Chêne, le Houx, le Noisetier, le Pommier et le Saule. Vous pouvez faire le choix d’une autre essence qui fasse écho à vos goûts ou votre inspiration : mon Arbre-Maître est un vieil olivier de mon jardin presque quadri-centenaire.
Autour de votre arbre, à une distance qui correspondra au rayon de votre espace, matérialiser les quatre points cardinaux avec :
- Au Nord, un bol de terre (et une bougie noire pour le rituel de nouvelle lune)
- À l’Est, une plume ou une clochette (et une bougie bleu-ciel pour le rituel de Premier Quartier)
- Au Sud, un bol de charbon de bois ou de cendres (et une bougie rouge pour le rituel de pleine lune)
- À l’Ouest, une coupelle d’eau (et une bougie vert d’eau pour le rituel de nouvelle lune)
Vous pouvez adapter les couleurs des bougies selon ce qui fait le plus sens pour vous pour les correspondances avec les quatre Éléments. On peut par exemple préférer une bougie marron pour la Terre, une bougie jaune or pour l’Air, une orange pour le Feu ou une bleue pour l’Eau… De même, si l’allumage de bougie en extérieur présente un risque, préférez une bougie chauffe-plat dans un verre photophore de la couleur appropriée.
Au pied de l’arbre, au sol ou sur un petit autel que vous aurez dressé devant, déposez :
- Une pierre d’ancrage (tourmaline noire, onyx noir sont des bons choix)
- Un objet de dévotion (si vous le souhaitez)
- Une coupe d’eau
- Une bougie blanche allumée et de l’encens (uniquement si les conditions et la réglementation en vigueur le permettent afin de ne pas provoquer d’incendie)
- Éventuellement de quoi vous asseoir confortablement : petit tapis, zafu, coussin…
Vous placerez également une offrande en fonction des Esprits élémentaires que vous invoquerez. Elle sera de préférence un don consommable issu du travail des humains et en rapport avec l’Élément concerné. Veillez toujours à vous assurer au préalable que l’offrande ne présente aucun danger ou aucune toxicité si celle-ci venait à être ingérée par des animaux (pas de lait, de pain, de sucreries ou de chocolat par exemple). Placez une coupelle contenant l’une de ces offrandes :
- En Lune Noire pour les Gnomes : bière, cervoise, cidre, fruits secs, graines de céréales (blé, maïs, riz, orge, millet, seigle…)
- En Premier Quartier pour les Sylphes : hydromel, tisane, thé ou infusion au miel
- En Pleine Lune pour les Salamandres : Hypocras rouge, vin rouge aux épices ou additionné d’un peu de poivre ou de piment, bol avec quelques petits piments séchés ou quelques grains de poivre
- En Dernier Quartier pour les Ondines : de l’eau « vive » (récoltée d’une source, d’une cascade, d’un torrent ou d’une rivière), de l’eau d’eade mer, de l’eau chargée (eau d’orage, eau lunaire, élixir de cristal (eau de source chargée avec un cristal de préférence bleu, indigo ou violet), ou à défaut de l’eau de source en bouteille que vous laisserez se ré-oxygéner le jour même dehors à la lumière du soleil dans un verre.
Le soir de votre rituel, placez vous face à l’est devant votre arbre. Prenez conscience de votre espace sacré délimité par les différents objets aux quatre points cardinaux. Pénétrez dans votre Cercle par l’Ouest, avancez de quelques pas et installez-vous au sol. Si vous êtes familiarisé avec cette pratique, vous vous prévoir un temps de méditation de pleine conscience. Sinon, prêtez simplement attention à votre souffle de sorte que votre respiration soit la plus naturelle et détendue possible. Gardez une posture « digne », c’est à dire, qui ne soit ni tendue, ni avachie, mais suffisamment droite pour vous permettre d’inspirer et d’expirer librement, sans tension. Prêtez attention à ce qui vous entoure autour de vous : l’air dans les feuilles des arbres, les odeurs de la terre et des végétaux environnants. Prenez conscience de l’espace sacré dans lequel vous vous trouvez et dans lequel vous êtes vous-même comme un arbre, enraciné solidement dans le sol de la terre-mère et la tête connectée au ciel. Ressentez les énergies telluriques et célestes vous parcourir et vous nourrir.
Quand vous vous sentirez prêt, ouvrez vos travaux selon votre habitude et suivez le rituel correspondant à la phase lunaire.
Je souhaite que ce rituel vous apporte ses bienfaits et qu’il vous donne l’envie de vivre plus souvent la magie des éléments au rythme de la Lune.
Luernos Glanicae