L'idée des origines communes
Le projet One Tree est nĂ© des conclusions passionnantes auxquelles sont parvenus des linguistes et d’autres chercheurs, selon lesquelles les cultures d’Europe occidentale et d’Inde reprĂ©sentent les deux extrĂȘmes de la rĂ©partition de ce qui Ă©tait Ă l’origine une seule langue et une seule culture, connue sous le nom de proto-indo-europĂ©en. Les avis divergent quant Ă la localisation gĂ©ographique de cette source originelle, la plupart des universitaires privilĂ©giant actuellement un point d’origine situĂ© il y a 8 Ă 11 000 ans, soit en Anatolie (l’actuelle Turquie), soit plus au nord, dans la rĂ©gion de Kurgan, qui comprend des territoires aujourd’hui situĂ©s en Ukraine, en Russie et au Kazakhstan. Une thĂ©orie moins populaire postule un point d’origine dans la rĂ©gion qui fait aujourd’hui partie du nord-ouest de l’Inde.
Quel que soit l’endroit oĂč nos langues et certains aspects de nos cultures sont apparus, le fait qu’ils semblent avoir un point d’origine unique est une idĂ©e extrĂȘmement excitante qui, en soi, a connu une histoire mouvementĂ©e : elle a Ă©tĂ© cooptĂ©e par les nazis dans leurs tentatives de justifier l’idĂ©e d’une race maĂźtresse aryenne, puis a Ă©tĂ© invoquĂ©e comme Ă©tant Ă l’origine de l’effondrement d’une sociĂ©tĂ© matriarcale imaginaire en Europe.
Des recherches rĂ©centes, menĂ©es notamment par des linguistes, ont toutefois permis d’Ă©tablir que le mot « aryen » est un terme qui n’a jamais Ă©tĂ© utilisĂ© dans la littĂ©rature europĂ©enne.
Des recherches rĂ©centes, menĂ©es notamment par des linguistes, nous permettent toutefois d’envisager la thĂ©orie des origines indo-europĂ©ennes communes avec une rigueur scientifique renouvelĂ©e, exempte de toute contamination par des agendas politiques.
Dans le cadre du projet One Tree, nous nous intéressons particuliÚrement aux liens entre les traditions celtiques ou druidiques et les traditions dharmiques. Depuis que Dion Chrystosom, au premier siÚcle de notre Úre, a souligné les similitudes entre les druides et les brahmanes, les chercheurs ont été attentifs à ces similitudes apparentes, mais quelle est la base réelle de cette perception ?
Des recherches plus approfondies sont nĂ©cessaires, c’est pourquoi le projet vise Ă crĂ©er un fonds de bourses pour encourager les travaux d’Ă©tude, la rĂ©daction d’un livre ou la recherche postuniversitaire dans ce domaine. En attendant, nous devons nous contenter d’un aperçu des similitudes qui existent, dont quelques-unes sont mentionnĂ©es ici :
a) Langue – « Le nom mĂȘme de druide est composĂ© de deux racines celtiques qui ont des parallĂšles en sanskrit. En effet, la racine vid pour connaissance, qui apparaĂźt Ă©galement dans le mot sanskrit Veda, dĂ©montre la similitude. La racine celtique dru, qui signifie « immersion », apparaĂźt Ă©galement en sanskrit. Un druide Ă©tait donc quelqu’un « immergĂ© dans la connaissance ». Peter Beresford-Ellis. Voir d’autres liens ici.
b) L’organisation de la sociĂ©tĂ© et des villages est rĂ©putĂ©e similaire, tout comme les rĂŽles historiques des brahmanes et des druides.
c) GĂ©ographie sacrĂ©e – Voir « Celtic Heritage » par Alwyn & Brinley Rees.
d) Nombres – Voir « Celtic Heritage » par Alwyn & Brinley Rees
e) Astrologie – « La cosmologie celtique est un parallĂšle Ă la cosmologie vĂ©dique. Les anciens astrologues celtes utilisaient un systĂšme similaire basĂ© sur vingt-sept mansions lunaires, appelĂ©es nakshatras en sanskrit vĂ©dique. Ă l’instar du Soma hindou, le roi Ailill de Connacht, en Irlande, avait fait construire un palais circulaire dotĂ© de vingt-sept fenĂȘtres par lesquelles il pouvait contempler ses vingt-sept « femmes-Ă©toiles ». C’est lĂ que subsiste le cĂ©lĂšbre calendrier celtique du premier siĂšcle avant notre Ăšre (le calendrier de Coligny) qui, dĂšs sa dĂ©couverte en 1897, a Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme prĂ©sentant des parallĂšles avec les calculs calendaires vĂ©diques« . Early Irish Astrology : An Historical Argument par Peter Berresford Ellis
f) Lois – Les lois de l’ancien druide Brehon d’Irlande et les anciennes lois indiennes de Manu prĂ©sentent apparemment de nombreuses similitudes.
g) Art – Le chaudron de Gundestrop a longtemps Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme l’un des plus beaux exemples d’art celtique, fabriquĂ© en Thrace mais retrouvĂ© au Danemark. On considĂšre aujourd’hui qu’il est possible que l’image du dieu cornu soit celle de Pasupati, un prototype de Shiva, dĂ©couvert au dĂ©but de la civilisation de la vallĂ©e de l’Indus. Il est certain qu’un sceau de l’ancienne citĂ© de Mohenjodaro, dans la vallĂ©e de l’Indus, ressemble remarquablement Ă la scĂšne reprĂ©sentĂ©e sur le chaudron.
h) Histoire – Voir « Celtic Heritage » d’Alwyn & Brinley Rees, et cet article de la BBC.
i) PoĂ©sie – Voir ici.
j) Mythe – Voir ici.
k) Musique – « Il semble que les premiers Celtes irlandais et les Hindous vĂ©diques croyaient que les dieux aimaient particuliĂšrement la musique ; les poĂštes-chanteurs chantent et louent les dieux dans l’intention que les dieux soient heureux et peuvent accorder des dons. Les deux cultures accordent une grande importance Ă la musique, aux sons et aux vibrations – dans l’Irlande ancienne, il s’agit surtout de musique vocale, d’incantations poĂ©tiques et de musique de harpe ; la musique vĂ©dique est principalement vocale et se compose de samans chantĂ©s, de rĂ©citations, etc. Si la reconnaissance du pouvoir spirituel de la musique est presque universelle dans les traditions anciennes, les musicologues ont examinĂ© certaines de ces questions et suggĂšrent des correspondances Ă©troites entre ces cultures particuliĂšres« . Dr Karen Ralls.
l) Pratique rituelle – les druides et les brahmanes font tous deux des offrandes Ă un feu rituel.
m) Doctrine – les auteurs classiques affirment que les druides enseignaient la doctrine de la transmigration des Ăąmes – une forme de rĂ©incarnation enseignĂ©e dans les religions dharmiques.
n) Les bosquets sacrĂ©s – en Inde et dans les pays celtes, les bosquets sacrĂ©s Ă©taient, et sont toujours, utilisĂ©s comme des temples dans la nature. Voir ici pour la perspective druidique. Pour la perspective indienne, voir ici.
Pour un Ă©quilibre, voir l’article Druides et brahmanes : Une erreur d’identitĂ© ? par Catherine Robinson
Pour plus d’informations, voir la section de ce site web : Le druidisme et les anciennes religions de l’Inde – et voir les essais dans le sous-menu de cette section sur le druidisme et l’hindouisme, le bouddhisme et le jaĂŻnisme. Voir Ă©galement ce site sur les religions proto-indo-europĂ©ennes.
Et voir « Pourquoi le dĂ©bat sur l’indo-europĂ©en est important – et trĂšs important ».
Le druide – voyant du dharma
« Il convient de rappeler que le terme clĂ© du bouddhisme, Dharma, est Ă©tymologiquement directement liĂ© Ă celui de druide, qui peut donc ĂȘtre traduit par « voyant du Dharma ». Des dĂ©tails Ă©tymologiques Ă ce sujet sont donnĂ©s par le Dr Ernest Klein, A Comprehensive Etymological Dictionary Of The English Language (Dictionnaire Ă©tymologique complet de la langue anglaise), Elsevier, 1971 : Dharma en sanskrit, qui signifie loi, droit, justice, est apparentĂ© au latin Firm, ferme, inĂ©branlable, stable, fort, dharna – un mode d’obtention de la justice par le jeĂ»ne en s’asseyant Ă la porte de son dĂ©biteur, exactement comme pratiquĂ© dans la druiderie ; ces mots viennent de la racine spĂ©culative IE *dher, tenir, soutenir, d’oĂč aussi thĂ©rapie, trĂŽne, Darius « celui qui tient le Bien », confirmer, affirmer, et beaucoup d’autres mots dans beaucoup d’autres langues. Le terme celtique pour le chĂȘne Ă©tait dru, dans le sens Ă©tymologique de l’arbre qui dure, qui soutient, qui survit Ă la tempĂȘte. Endurance, durĂ©e, durable, pendant, viennent tous du latin durus, dur, signifiant littĂ©ralement « dur comme du bois » Ă partir d’une base IE « derew, *drew *dru, signifiant arbre, bois, d’oĂč Ă©galement le grec drus, signifiant chĂȘne, arbre, dromos signifiant forĂȘt, bois, dendro – forme combinĂ©e grecque signifiant arbre ; le vieil irlandais dru, bois, bois, daru – bois, le vieil anglais tree, treow, signifiant arbre, bois. Le mot anglais « truth » (vĂ©ritĂ©), « trust » (confiance) est Ă©galement issu d’une racine apparentĂ©e. Il en va de mĂȘme pour le vieil irlandais dron, ferme, le gallois Derwen, chĂȘne, le lituanien derva – bois rĂ©sineux, le russe droma, fourrĂ©, forĂȘt primitive, le vieil irlandais daur, chĂȘne ; l’armĂ©nien tram – ferme, le persan avestan dauru, dru- signifiant bois, le hittite taru – arbre, bois, le grec ancien drumos, bois de chĂȘne, l’albanais dru – bois, arbre, poteau, drusk – chĂȘne, ainsi que le grec Dryades, signifiant bois.
Les esprits, les dĂ©esses qui habitent les arbres. Le groupe de sons de base et les groupes conceptuels mis en Ă©vidence dans ces racines primitives du groupe linguistique indo-europĂ©en semblent indiquer que les premiers peuples ancestraux de toutes les tribus indo-europĂ©ennes assimilaient les arbres, les bois et les forĂȘts Ă la vĂ©ritĂ© ultime primitive, dĂ©pendant comme ils le faisaient du bois pour la chaleur, le feu, la lumiĂšre, l’abri, les maisons, de nombreux aliments, les ustensiles, les charrettes, les roues, etc. De mĂȘme, les concepts mĂ©taphysiques de justice, de vĂ©ritĂ© et de droit Ă©taient exprimĂ©s par des sons similaires. La façon dont les sons ont des corrĂ©lats physiques et mĂ©taphysiques remonte Ă la capacitĂ© de l’esprit humain Ă former des mĂ©taphores ; ainsi, le bois, qui est dur, en vient Ă dĂ©signer des choses mĂ©taphysiques qui sont Ă©galement dures et durables. Le druide est par dĂ©finition celui qui voit, connaĂźt et travaille avec les deux rĂ©alitĂ©s – physique et mĂ©taphysique. Voir le dictionnaire de Klein sous « dure », « arbre », « vĂ©rité », « druide », « dharma », pour les dĂ©tails exacts de ces Ă©tymologies. C’est Pline qui, le premier, a suggĂ©rĂ© que « druide » venait du « connaisseur du chĂȘne », mais il s’agissait d’une banalisation romaine (peut-ĂȘtre sans s’en rendre compte) ; les faits montrent que « druide » a une signification beaucoup plus profonde, Ă savoir le connaisseur du Dharma (loi cosmique) reprĂ©sentĂ© par le chĂȘne, le connaisseur de l’arbre cosmique de la vĂ©ritĂ©, le connaisseur ou le voyant du corps ultime de la sagesse derriĂšre l’univers, qui se manifeste Ă l’humanitĂ© sous la forme de l’arbre de la vie. En tant que « voyant du Dharma, de la vĂ©ritĂ© cosmique, le druide est donc phĂ©nomĂ©nologiquement Ă©quivalent Ă un « Bouddha », ce qui est tout Ă fait normal.
Extrait de Druidry & Transpersonal History, la onziÚme conférence du Mount Haemus Award par Thomas Clough Daffern.
Voir ici pour un compte-rendu du deuxiĂšme rassemblement One Tree.
Voir ici pour un article et des photos sur le One Tree Gathering 2018.
Et voyez les vidĂ©os ci-dessous de Philip Carr-Gomm parlant Ă Nagpur en 2009 de la thĂ©orie d’une origine commune, d’un festival Samhain-Diwali en Ulster, et d’un Raga celtique jouĂ© sur deux harpes par un seul homme – le harpiste italien Vincenzo Vitello.
Traduction Fabien